, le 23/10/2010

Au lendemain de leur condamnation en appel, la trentaine d’occupants d’un immeuble de la Place des Vosges ont été expulsés par la police.

Tôt dans la matinée de ce samedi 23 octobre, la police a procédé à l’expulsion des 32 squatteurs qui occupaient un somptueux hôtel particulier inhabité de la place des Vosges, dans le IVe arrondissement parisien.

Hier, la cour d’appel de Paris avait ordonné l’expulsion sans délai des membres du collectif Jeudi noir qui avaient envahi ces locaux de 1.500 mètres carrés en octobre 2009 et les avait condamnés à verser quelque 80.000 euros d’indemnités.

Selon Margaux Leduc, les forces de l’ordre se sont présentées sur les lieux vers 7h et ont défoncé la porte d’entrée de l’immeuble.

De son côté, un représentant de la préfecture de police a assuré « qu’il n’y a pas eu besoin de défoncer la porte », car « quelqu’un venait de sortir ».

L’opération qui a débuté vers 7h30 a duré près d’une heure a indiqué le porte-parole de la préfecture, expliquant que les occupants du squat ont été « rassemblés dans la cour du bâtiment », puis que les policiers leur ont laissé prendre leurs affaires, inventoriées par un huissier, et que certains ont aussitôt quitté les lieux.

Effectivement, les policiers « ne se sont pas mal tenus », a confirmé Mme Margaux ironique, tout en déplorant que l’avocat du collectif, Me Pascal Winter, ait été interdit d’accès au bâtiment.

Interrogé par l’AFP, ce dernier a pris « le pari que dans six mois l’immeuble sera toujours vide », comme il l’était depuis 1966, déplorant qu’à l’aube de l’hiver, « on expulse et on n’a évidemment rien proposé en terme de relogement ».

D’un point de vue judiciaire, cette expulsion met probablement un terme à l’affaire, car « il n’y a pas de recours efficace », a précisé l’avocat qui évoque tout de même un éventuel « recours concernant les indemnités ».

Durant leur occupation, les squatteurs ont pris grand soin de ne pas dégrader l’hôtel particulier aux plafonds à la française, aux poutres peintes et aux grandes cheminées de pierre, mais cela n’a pas convaincu la propriétaire des lieux Béatrice Cottin, 88 ans, de leur laisser passer un nouvel hiver dans ses murs.

Elle a donc obtenu leur expulsion assortie d’une indemnité d’occupation de 10.000 euros pour la fin 2009 et de 72.000 euros pour la période du 25 janvier 2010 à ce jour, soit trois fois moins qu’.

Dans son arrêt de vendredi, a reconnu « le souci légitime du collectif d’attirer l’attention des pouvoirs sur les difficultés de logement auxquelles sont habituellement confrontés les étudiants et les jeunes occupant un emploi », mais elle a estimé que les squatteurs s’étaient rendus coupables d’une « atteinte au droit de propriété ».

Alors qu’avant ce jugement, le Conseil de Paris avait apporté son soutien aux occupants de l’immeuble, la plupart des élus de gauche ont dénoncé ce verdict, évoquant un « regret » voire un « déni de justice ».

Qualifiant cette occupation de « réquisition citoyenne » dans « l’intérêt général », le Parti de gauche a exigé « que des solutions de relogement soient immédiatement proposées » aux étudiants et travailleurs précaires expulsés ce matin.

« C’est un gouvernement désespérant pour la jeunesse » a déclaré Eric Coquerrel, le secrétaire national du parti présent sur place, tout comme Mgr Jacques Gaillot qui ne s’attendait pas à « ce spectacle » et s’est dit honteux pour son pays, ou encore Jean-Baptiste Eyraud, le porte-parole de l’association Droit au logement qui a parlé d’injustice et de « bavure sociale ».

Selon le représentant de la préfecture, les propriétaires « ont désormais un projet immobilier », ainsi « ce bien ne restera plus vide comme par le passé », ce que Jeudi noir avait qualifié de « scandale alors que la capitale manque cruellement de logements ».

« Afin de mener à bien un véritable projet immobilier conforme au caractère des lieux, la tutrice légale de la propriétaire a engagé les démarches pour vendre une partie de son patrimoine immobilier », a précisé la préfecture.

A noter : si l’expulsion s’est déroulée « sans incident », la police a par la suite fait usage de gaz lacrymogènes pour repousser les ex-squatteurs et la cinquantaine de militants associatifs et syndicaux qui ont tenté de forcer l’entrée du bâtiment situé rue de Birague.

Les manifestants se sont ensuite allongés au milieu de la chaussée, ils ont pique-niqué dans la bonne humeur, puis ils se sont dispersés dans le calme aux alentours de midi.