Lettre de Jeudi-Noir à Benoist Apparu
Mail envoyé le 9 janvier…
——————————–
Messieurs,
Plus de dix semaines après votre promesse écrite de « prendre mon attache » « dans les jours à venir », je me permets de vous écrire à nouveau, puisque manifestement mes nombreux coups de fil depuis ces derniers mois ne vous ont pas été transmis.
Comme vous le savez peut-être, le collectif Jeudi Noir, ayant été expulsé de son immeuble réquisitionné place des Vosges, occupe un nouveau bâtiment situé au 22 avenue Matignon. Nous aimerions rencontrer le secrétaire d’Etat au Logement Benoist Apparu pour évoquer une alternative à la situation stérile actuelle, qui voit la préfecture mobiliser plusieurs cars de policiers jour et nuit pour empêcher matelas et duvets d’être acheminés dans un immeuble vide, dans le but de s’assurer que les mal-logés restent bien mal-logés, et les bâtiments vides bien vides.
Par ailleurs, nous avons amplement relayé la promesse de M. Apparu de plafonner les loyers au mètre carré en l’absence de proposition de régulation des professionnels du secteur. Ceux-ci vous ayant fait comprendre publiquement à quel point la question les laissait insensibles, il vous reviendrait, conformément à vos propres propos, d’user de l’arme de la réglementation. Les jeunes et les pauvres étant les plus susceptibles de s’acquitter de loyers indécents au mètre carré, et le collectif Jeudi Noir n’étant jamais composé peu ou prou que de pauvres jeunes, nous serions très satisfaits de pouvoir aborder cette question éminemment politique avec le secrétaire d’Etat.
Ayant eu l’impression que vous nous aviez quelque peu oubliés, nous nous sommes permis de nous rappeler à votre bon souvenir. Veuillez y voir l’expression de notre vif désir de vous revoir, et agréer l’expression de nos sentiments les meilleurs.
Fort cordialement
Manuel Domergue pour le collectif Jeudi Noir.
——————————————————-
Monsieur,J’ai bien reçu votre demande d’entretien avec le ministre. Je vous en remercie et ne manquerai pas de prendre votre attache dans les jours à venir.Cordialement,
Fabien MétayerChef de cabinetConseiller auprès du Secrétaire d’État au logement et à l’urbanisme
De : Manuel Domergue
Envoyé : lundi 25 octobre 2010 14:46
À : Thiebaux Franck
Objet : Re: Demande de rendez-vous auprès de M. Benoist Apparu
Monsieur Thiébaux,
Je me permets de vous écrire au nom du collectif Jeudi Noir. Comme vous le savez, 33 de nos membres ont été expulsés sans relogement d’un immeuble vide depuis 1966 situé sur la place des Vosges, samedi matin 23 octobre 2010.
Les jugements en première instance et en appel demandaient l’expulsion, mais aussi le relogement de ses habitants par la préfecture, ce qui ne fut pas fait. Nous n’avons même pas pu entamer la moindre discussion à ce sujet avec les représentants de l’Etat. Par ailleurs, les occupants devraient être prioritaires au sein de la procédure DALO, mais là encore rien ne leur est proposé qui puisse remédier à leur situation.
Bien que légale, l’expulsion du bâtiment de la place des Vosges représente un acte d’une grande violence pour ses habitants, à l’approche de l’hiver, alors que tous sont en situation de fragilité de logement. Aujourd’hui, ils en sont réduits à demander un hébergement précaire chez des proches, mais cette situation ne pourra perdurer : la police, sur les ordres du gouvernement, a bel et bien créé 30 SDF supplémentaires à l’approche de l’hiver.
C’est à ce sujet que nous nous permettons de solliciter un rendez-vous auprès du secrétaire d’Etat au Logement Benoist Apparu. Nous aimerions examiner avec lui les possibilités de relogement que le droit au logement, à valeur constitutionnelle, lui impose. Nous aimerions également aborder des sujets d’actualité comme le plafonnement des loyers qu’il a promis sans, pour l’instant, appliquer, alors même que les représentants de la profession immobilière ont clairement fait connaître leur opposition à sa proposition, ouvrant ainsi la voie de l’action réglementaire annoncée à la une de Libération. Nous aimerions enfin étudier ensemble les possibilités de mettre un terme à la vacance de longue durée sans fondement de biens immobiliers, qui nous pousse à faire le travail de réquisition que l’Etat devrait mener à notre place en vertu de l’ordonnance de 1945.
Je vous remercie de l’attention que vous porterez à notre demande, en mesurant l’urgence sociale de la situation des habitants de notre immeuble, ainsi que le signal extrêmement négatif envoyé à la jeunesse de ce pays samedi matin à l’aube.
Bien cordialement
Manuel Domergue